lundi 9 septembre 2024

La corde

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16 - La corde


- Chérie ? Il n'y a aucune raison de ne pas parler, ici, chez nous, à la maison d'une corde n'est-ce pas ?


- Non, mais je ne comprends pas et pourquoi d'ailleurs parlerions nous d'une corde. Elle est bizarre ta question, mais... d'où viens-tu ? Où étais-tu, ce sac c'est quoi ? Eh bien peut-être bientôt, dans cette maison, ne devions nous plus, ne ........................ plus parler de corde.


Jimmy Hallery sort d'un sac bricorama un rouleau de corde, une espèce de corde à vache. Il est lourd et peine à le hisser sur son épaule puis grimpe au premier étage. Là, il défait les attaches qui maintiennent le cordage, le déroule, prend un bout  le passe autour de la rambarde du palier et fait un nœud, s'assure de son serrage, amène l'autre extrémité de cordage et confectionne une ganse dont il vérifie qu'elle coulisse bien et se la passe autour du cou.


Brittney n'a pas compris ce qui ce passait. Elle est restée dans le vestibule, la t^te levée vers le palier. Elle voit le nœud autour du coup de Jimmy Hallery. 


- Vois-tu chérie, lui dit-il avec ce nœud étrange, penché par dessus la balustrade, ça va être chose faite tu ne pourras plus parler de corde dans la maison. On ne parle jamais de corde dans la maison d'un pendu.


Brittney est pétrifiée, ses jambes s'évanouissent. Elle a des sueurs. Elle a un froid subit comme une main de glace souple qui l'irradie le long de la colonne vertébrale. Elle veut hurler. Elle ne peut pas. Elle ne voit plus rien. Une masse sombre. Jimmy a enjambé la balustrade. La a corde qui se tend fait gémir le bois, l'on entend un craquement le corps rebondit et tombe, se balance quelques minutes, une langue, des yeux, Brittney Hallery glisse le long du mur du vestibule, s'effondre sur le parquet. Au dessus de son visage, les pieds de Jimmy tournoient encore un peu. La sonnerie de l'entrée retentit stridente, transperçante. Le corps de Jimmy la nuque brisée, ......................... s'immobilise enfin.


De l'autre côté du vitrage opaque de la porte d'entrée le facteur rédige son avis de passage, signifiant l'arrivée d'un recommandé avec avis de réception à aller retirer dans les quinze jours au bureau de poste. Avant de glisser l'avis par la lunette de la boîte, par acquit de conscience, il sonne encore longuement. La sonnerie est obscène, hurlante, elle déclenche le réveil et un hurlement de Brittney Hallery. Le facteur se baisse, lève la lunette de la boîte aux lettres. Voit


Dans son lit d'hôpital Brittney Hallery ne cesse de penser malgré les sédatifs. Elle revoit le corps au bout de la corde. Les pieds qui la frôlent. La veille, au sortir du dîner, Jimmy lui a dit : "Chérie, je ne tiens plus, j'ai l'impression bizarre d'être usé jusqu'à la corde.


La corde


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   Jean-Edern revient de chez Bricorama et sort de son sac un rouleau de dix mètres de cordage naturel de huit millimètres de diamètre . 


   Il grimpe tout de suite au deuxième étage de sa vieille maison. Là, il défait les attaches qui maintiennent le cordage, le déroule, prend un bout  le passe autour de la rambarde du palier et fait un nœud, s'assure de son arrimage, amène l'autre extrémité du cordage et confectionne un noeud coulant qu'il se passe autour du cou et dont il vérifie qu'il coulisse bien, et d'ailleurs qu'il y ajuste et qui lui serre bien le cou. 


Ophélie n'a pas compris ce qui se passait. Elle n'a qu'entendu qu'une porte qui s'ouvrait, un mouvement dans le vestibule, et comme Jean-Edern ne vient pas vers elle finit par s'extirper de son fauteuil et de ses quatre mariées pour une lune de miel et sort du séjour.


   Elle a voit une corde qui se balance, sous son nez, qui remonte et elle la suit et remonte avec elle du regard et voit là-haut Jean-Edern qui trifouille ce qui doit être une corde. Une corde ?


   Que fais-tu Jean-Edern, où étais-tu ? mais que fais-tu ?  Elle voit le nœud autour du cou de Jean-Edern et pâlit, mais qu'as-tu trouvé encore, tu fais quoi, tu joues à quoi.... Jean-Edern, Jean-Edern ...
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- Vois-tu chérie, lui dit-il avec ce nœud étrange autour du cou, le buste penché par dessus la balustrade, ça va être chose faite celui que tu traites de vieux con, celui auquel tu dis un jour comme ça, l'air de rien, quarante ans après je n'ai jamais aimé tes lèvres eh bien ton vieux gros con il va sauter à la corde heine sauter à la corde. A ces mots Jean-Edern ...  


Ophélie ne comprend toujours pas. Mais comprend que quelque chose se passe va se passer. Comprend tout soudain. Elle est pétrifiée, ses jambes lâchent. Elle a des sueurs. Un froid subit la perfuse. Elle veut hurler. Elle ne peut pas. Elle ne voit plus rien. Elle se sent défaillir ... 


   A ces mots Jean-Edern ne sent plus de ... 


   Jean-Eden a enjambé la balustrade et saute. La masse sombre d'un grand corps désarticulé chute et s'écrase sur le parquet du rez-de-chaussée dans un énorme bruit sourd. Il a mal  calculé son coup, mal évalué la longueur utile. La corde était trop longue et ne l'étrangle pas. 


   Jean-Edern gît aux pieds d'Ophélie, fracassé mais pas étranglé. 

   

   Ophélie a glissé le long du mur du vestibule, s'est effondrée sur le parquet. La sonnerie de l'entrée retentit stridente, transperçante. Jean-Edern gît, geint. Ophélie évanouie gémit.


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   De l'autre côté du vitrage opaque de la porte d'entrée le facteur rédige son avis de passage, signifiant l'arrivée d'un recommandé avec avis de réception à aller retirer dans les quinze jours au bureau de poste. Enfin je n'en sais rien.


    Avant de glisser l'avis par la lunette de la boîte. Par acquit de conscience, il sonne encore longuement. La sonnerie est obscène, hurlante mais ravive les sens d'Ophélie qui revient à elle et voit la silhouette du facteur s'éloigner. Elle voit l'autre à ses pieds, ça saigne.


    Elle rage en l'entendant agonir, Elle rage de s'être fait avoir, d'avoir cru qu'elle pouvait lui dire n'importe quoi, n'importe quand, n'importe comment pour se venger de s'entendre abaisser constamment du moins est-ce son analyse, son ressenti, elle rage de le voir se tordre et de baver du sang. Le con, il ne fera jamais bien les choses, il s'est raté, et maintenant c'est moi qui vais devoir m'en occuper, alors elle remobilise toutes ses forces, se lève, se bouge, saisit la corde et fait glisser le noeud et serre et serre et serre et serre le noeud coulant, le visage se gonfle devient braise ardente, le corps a des tressautements, se tend, les jambes se dressent, se lancent dans un un gigotement de pantin et retombent, elle serre, ah mon vieux je savoure, elle serre, puis soudain un grand râlement tout retombe, tout s'éteint tout se calme, Ô quelle paix, Ô cette paix qui suit les grands crimes, merci mon Dieu.


  Ophélie est en nage, épuisée.


  Elle fait le 15, le 15 arrive en force et ne comprend pas que la vertèbre de la nuque ne soient pas brisée puisqu'il est tombé du deuxième étage, il appelle la police, Ophélie fait une crise nerveuse...


  Mais vous ne voyez pas qu'il s'est jeté de là-haut, vous ne voyez pas, mais madame l'on voit que ... quoi que c'est moi qui l'ai fracassé comme ça, alors comment alors comment expliquez-moi ....


  De grands cernes la creuse... 


   Quand même quand même curieux que la corde ne soit pas tendue qui aurait dû lui briser la nuque curieux ces yeux exhorbités cette langue ces teintes violacées .. 


   Mais madame madame ... 


   Ophélie a bondi et et gravit les escaliers quatre à quatre madame, madame quatre à quatre bondit, vole, elle est au deuxième, elle est essouflée, un policier un ambulancier courent après elle, vont la saisir mais d'un coup de rein elle franchit la balustrade et roule et tombe dans le vide ...


    Le crâne, le crâne sur le parquet ciré, le crâne et dans une dernière contorsion s'écroule sur le corps de Jean-Edern, deux corps, deux corps...

 

     Une corde, du sang, un tohu bohu de blouses blanches de policier ... Deux corps, deux morts, du sang... Des pieds les enjambent essaient d'éviter les flaques ... 


   L'urgentiste du Samu sort, il vomit sur le trottoir.



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16 - La corde


- Chérie ? Il n'y a aucune raison de ne pas parler, ici, chez nous, à la maison d'une corde n'est-ce pas ?


- Non, mais je ne comprends pas et pourquoi d'ailleurs parlerions nous d'une corde. Elle est bizarre ta question, mais... d'où viens-tu ? Où étais-tu, ce sac c'est quoi ? Eh bien peut-être bientôt, dans cette maison, ne devions nous plus, ne ........................ plus parler de corde.


Jimmy Hallery sort d'un sac bricorama un rouleau de corde, une espèce de corde à vache. Il est lourd et peine à le hisser sur son épaule puis grimpe au premier étage. Là, il défait les attaches qui maintiennent le cordage, le déroule, prend un bout  le passe autour de la rambarde du palier et fait un nœud, s'assure de son serrage, amène l'autre extrémité de cordage et confectionne une ganse dont il vérifie qu'elle coulisse bien et se la passe autour du cou.


Brittney n'a pas compris ce qui ce passait. Elle est restée dans le vestibule, la t^te levée vers le palier. Elle voit le nœud autour du coup de Jimmy Hallery. 


- Vois-tu chérie, lui dit-il avec ce nœud étrange, penché par dessus la balustrade, ça va être chose faite tu ne pourras plus parler de corde dans la maison. On ne parle jamais de corde dans la maison d'un pendu.


Brittney est pétrifiée, ses jambes s'évanouissent. Elle a des sueurs. Elle a un froid subit comme une main de glace souple qui l'irradie le long de la colonne vertébrale. Elle veut hurler. Elle ne peut pas. Elle ne voit plus rien. Une masse sombre. Jimmy a enjambé la balustrade. La a corde qui se tend fait gémir le bois, l'on entend un craquement le corps rebondit et tombe, se balance quelques minutes, une langue, des yeux, Brittney Hallery glisse le long du mur du vestibule, s'effondre sur le parquet. Au dessus de son visage, les pieds de Jimmy tournoient encore un peu. La sonnerie de l'entrée retentit stridente, transperçante. Le corps de Jimmy la nuque brisée, ......................... s'immobilise enfin.


De l'autre côté du vitrage opaque de la porte d'entrée le facteur rédige son avis de passage, signifiant l'arrivée d'un recommandé avec avis de réception à aller retirer dans les quinze jours au bureau de poste. Avant de glisser l'avis par la lunette de la boîte, par acquit de conscience, il sonne encore longuement. La sonnerie est obscène, hurlante, elle déclenche le réveil et un hurlement de Brittney Hallery. Le facteur se baisse, lève la lunette de la boîte aux lettres. Voit


Dans son lit d'hôpital Brittney Hallery ne cesse de penser malgré les sédatifs. Elle revoit le corps au bout de la corde. Les pieds qui la frôlent. La veille, au sortir du dîner, Jimmy lui a dit : "Chérie, je ne tiens plus, j'ai l'impression bizarre d'être usé jusqu'à la corde.

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3 juillet 2023




















































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Le crime parfait

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Un crime parfait 


Je vous le dis. En vérité, je vous le dis. Il y a prescription. J'ai soixante cinq ans. Ma vie s'achève. Et je vis le sursis qui m'est accordé puisqu'en l'instant où j'écris ces lignes, et si l'on doit se fier aux derniers résultats d'analyse, je ne suis exposé à moyen terme, ni à un cancer du colon, ni a un cancer de la prostate, mais je vis ce sursis comme le sas d'entrée en enfer considérant ce que je sais de la somme des turpitudes que j'ai commises toute ma vie durant. Oui, parce que si vous ne savez pas ce qu'a été ma vie moi je le sais.

Le passé me revient tout en vrac, soudain, m'envahit désormais, me hante, me possède. Ce passé fait plus que me coller à la peau comme la tunique de Nessus, il me fouaille, me ronge.

Je suis célibataire, pas de femme, pas d'enfant. Je ne sors plus. Une femme, j'ai failli en avoir une, puis deux, puis trois. Vingt-cinq même.

    Mais la femme dont je vous parle c'est la femme, la vraie, celle que j'ai aimée d'amour. Le vrai. Ce n'était pas un amour fou, c'était l'amour, le vrai. 

   Qu'est ce que le vrai. Je n'en sais rien. J'avais vingt-deux ans. Elle avait vingt deux ans. J'aimais sa chevelure, son sourire, ses lèvres, son parfum et ses boucles d'oreille. J'étais employé au service mécanographique. Evidemment, puisque ça date. Elle était employée aux écritures. On s'est croisé dans les locaux de l'entreprise. Un jour, ujn matin je m'en souviens encore, ça s'est passé dans l'escalier qui descendait du rez-de-chaussée au sous-sol. Je descendais. Moi aussi, comme l'escalier. Pour être bref et précis je descendais l'escalier. Elle montait de l'imprimerie étreignant une liasse de circulaires. Elle a levé les yeux vers moi. J'ai dû la troubler gravement. Elle a tout lâché d'un coup. 

    Il y a eu un bel envol de feuilles blanches qui après s'être complues dans les jolies et courtes arabesques se sont éparpillées sur toutes les marches. Je me suis baissé et l'ai aidée à ramasser, nos yeux se sont croisés, nos fronts, nos joues se sont frôlées. Chacun a dû rosir un peu. 

   C'est comme ça que nous sommes tombés amoureux. On a commencé à se fréquenter. C'est comme ça que l'on disait à l'époque. On était à la veille de mai soixante huit. 

   Elle s'appelait Apolline. Elle m'a dit : " Avec un p ". Je l'ai regardée. Ah ! bon. Je n'ai pas compris pourquoi elle m'avait dit ça. 

   Il est vrai qu'un soir nous allions au cinéma voir les canons de Navaronne avec avec ..., non ça les canons de Navarrone ce fût plus tard avec une autre, celle-là elle m'avait fait tout un scénario pendant la séance. Elle avait enlevé ses boucles d'oreille, puis donner sa langue. Carrément .. Elle était bonne d'ailleurs, mais je reviens à Apolline. Apolline ce soir là s'était étonnée que je ne connusse pas Colette, du moins que je parusse ne point la connaître. Comment tu ne connais pas Colette ! J'avais été vexé.

Un soir, c'était en août Apolline et moi cheminions sur le quai au bord du fleuve. J'était allé chez le coiffeur. J'avais le cheveu très court. Presqu'en brosse. J'avait fait mon service dans les parachutistes. Elle n'a pas aimé du tout. " Pourquoi as-tu fait ça ? " m'a-t-elle questionné. Donc ma tête ne lui revenait pas, donc l'amour qu'elle me portait n'était que physique. J'aimais bien pour ma part passer ma main sur ses seins ronds et bien agréables. J'avais aussi pu constater, du moins au toucher qu'elle se rasait. Quand je glissais ma main dans son slip ça me piquait agréablement c'était dru. J'aime bien moi quand le pubis est en friche ...

    Mon cœur n'était rien pour elle. Elle ne m'aimait pas, me désirait, c'était sexuel chez elle. Elle m'avait déjà bien contrarié avec Colette. Je suis même certain que j'ai connu Colette bien avant elle.

Je n'ai jamais trop su ce qui s'était passé. L'on marchait le long du quai épaule contre épaule. Nous nous étions pourtant soudain enfoncés dans un silence malheureux, peiné. Elle était côté fleuve. A un moment, je me suis écarté d'elle pour bien la regarder pour lui dire, captant son regard, avec mes yeux : " Apolline, pourquoi m'as tu dit ça ? ". 

      Elle a tourné la tête vers moi, puis elle a dû se prendre le talon entre deux pavés. Elle a crié, mais c'est parce qu'elle a dû se tordre la cheville et puis elle a basculé dans le fleuve. J'ai vu ses yeux effarés, ses jambes, elle tombait à la renverse, sa jupe glissait sur ses cuisses, sa petite culotte blanche, elle tombait on voit des trucs comme ça dans les films, un plouf, un bruit, un geyser. J'ai regardé, il y a eu des remous. J'aurais pu plonger. J'ai crié, j'ai fait des gestes avec les bras. Elle coulait, remontait, dérivait. J'ai eu peur. Je n'ai pas plongé. Les pompiers ont mis du temps pour la retrouver et la repêcher. Ils m'ont interrogé. La police, le juge. Suspicion d'homicide. Ils me regardaient les uns et les autres d'un drôle d'air. Je suis convaincu qu'ils se disaient que j'aurais pu plonger. Il faisait noir. Il y avait un fort courant, il y avait des tourbillons. Non, non ça c'est fait tout seul. J'aurai pu plonger.

     Ont-ils cru que je l'avais poussée. Sans nul doute. Ces gens-là ne sont pas des gens de la dernière averse, ils ont du métier ils n'ont pas manqué de diligenter leur police scientifique. Par chance j'ai eu un alibi, un allié auquel je n'avais pas prêté attention dans l'effroi du moment. Ils ont retrouvé l'un des escarpins qui dans la torsion du pied avait planté là et profondément son talon ... J'ai dit ; Vous voyez bien ! ... ça ne voulait à la réflexion rien dire  la poussant le talon aurait pu tout autant resté planté là .. Bon ils se sont fiés à ma bonne tête, la sidération dans laquelle j'étais les a dissuadés d'en rajouter ..

     La vérité c'est que après que je lui ai eu dit Apolline pourquoi m'as-tu dit ça, je me suis avancé vers elle déterminé, impassible, elle a reculé, elle est tombée dans l'eau. Oui c'est parce que le talon de son escarpin s'est coincé entre deux pavés. Si les pavés avaient été bien posés, calés, aussi, jadis l'on alignait les pavés au cordeau, ils se touchaient ... Enfin quand je dis se touchaient c'est une manière de parler ... l'on pourrait poursuivre la ville pour mise en danger d'autrui par défection du pavement..

Je l'aime encore, c'est la seule femme que j'ai aimée.

         On a retrouvé son corps plusieurs jours après dans la vase à un kilomètre.. Des rats avaient commencé à picoré sa chair gonflée j'aurais dû dire grignoté sa chair  ... c'est un policier qui me l'a dit ... 

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Je vous le dis.

   En vérité, je vous le dis. Il y a prescription. 

      J'ai soixante cinq ans. Ma vie s'achève. Et je vis le sursis qui m'est accordé puisqu'en l'instant où j'écris ces lignes, et si l'on doit se fier aux derniers résultats d'analyse, je ne suis exposé à moyen terme, ni à un cancer du colon, ni a un cancer de la prostate, mais je vis ce sursis comme le sas d'entrée en enfer considérant ce que je sais de la somme des turpitudes que j'ai commises toute ma vie durant.

    Oui, parce que si vous ne savez pas ce qu'a été ma vie moi je le sais. Le passé me revient tout en vrac, soudain, m'envahit désormais, me hante, me possède et me colle à la peau comme la tunique de Nessus.

   Je suis célibataire, pas de femme, pas d'enfant. Je ne sors plus. Une femme, j'ai failli en avoir une, puis deux, puis trois. Vingt-cinq même.

   Mais la femme dont je vous parle c'est la femme, la vraie, celle que j'ai aimée d'amour. Le vrai. Ce n'était pas un amour fou, c'était l'amour, le vrai. Qu'est ce que le vrai. Je n'en sais rien.

   J'avais vingt-deux ans. Elle avait vingt deux ans. J'aimais sa chevelure, son sourire, ses lèvres et ses seins. J'étais employé au service mécanographique du rectorat. Mécanographique évidemment, puisque ça date. 

      Elle était employée aux écritures, petite main administrative quoi ! . On s'est croisé dans les locaux de l'entreprise. Dans l'escalier qui allait du rez-de-chaussée au sous-sol. Je descendais. Elle montait de l'imprimerie étreignant une liasse de circulaires. Elle a levé les yeux vers moi. J'ai dû la troubler gravement. Elle a tout lâché d'un coup. Il y a eu un bel envol de feuilles blanches qui après s'être complues dans de jolies et courtes arabesques se sont éparpillées sur toutes les marches.

    Je me suis baissé et l'ai aidée à ramasser, nos yeux se sont croisés, nos joues se sont frôlées. Chacun a dû rosir un peu. C'est comme ça que nous sommes tombés amoureux. On a commencé à se fréquenter. C'est comme ça que l'on disait à l'époque. On était à la veille de mai soixante huit.

   Elle s'appelait Apolline. Elle m'a dit : " avec un p ! ". Je l'ai regardée. Ah ! bon. Je n'ai pas compris pourquoi elle m'avait dit ça.

     Un soir nous sommes allés au cinéma voir les Canons de Navarone, avec Anthony Quinn,  non je m'égare, je me trouble, ça les Canons de Navarone ce fût plus tard avec une autre, celle-là, c'était Françoise, elle vit encore, elle, elle m'avait fait tout un scénario pendant la séance. Elle avait enlevé ses boucles d'oreille, puis donné sa langue. Ah ! cette langue, ce que c'est bon une langue bien prise, bien consentante... Elle était bonne d'ailleurs, mais je reviens à Apolline. Un dernier mot sur Françoise, ça n'aurait pas duré, elle avait la chair laiteuse et de grosses cuisses. Mais sa langue ...

    Apolline ce soir là s'était étonnée que je ne connusse pas Colette, du moins que je parusse ne point la connaître.

    " Comment tu ne connais pas Colette ! " Nous descendions la rue du Calvaire. J'étais vexé.

     Un soir, c'était en août Apolline et moi cheminions sur le quai au bord du fleuve. J'était allé chez le coiffeur. J'avais le cheveu très court. Presqu'en brosse. J'avait fait mon service dans les parachutistes. 

   Elle n'a pas aimé du tout. " Pourquoi m'as-tu fait ça ? tu sais que je ne n'aime pas, ça te donne une drôle de tête. " m'a-t-elle fait la leçon.

     Donc ma tête ne lui revenait pas, donc l'amour qu'elle me portait n'était que physique. J'aimais bien pour ma part passer ma main sur ses seins ronds et bien agréables. J'avais aussi pu constater, du moins au toucher qu'elle se rasait. Sa chatte. A l'époque l'on ne connaissait pas le mot. Donc mon cœur n'était rien pour elle. Elle ne m'aimait pas, me désirait, c'était sexuel chez elle.

     Elle m'avait déjà bien contrarié avec Colette. Je suis même certain que j'ai connu Colette bien avant elle, elle la petite main, la sténo-dactylo. Je n'ai jamais trop su ce qui s'était passé. L'on marchait le long du quai épaule contre épaule. Nous cheminions en silence enfoncés dans un silence pesant, malheureux, peinés. Elle était côté fleuve. A un moment, je me suis écarté d'elle pour bien la regarder pour lui dire, captant son regard, avec mes yeux : " Apolline, pourquoi m'as tu dit ça ? ".

    Elle a tourné la tête vers moi, puis elle a dû se prendre le talon entre deux pavés. Elle a crié, mais c'est parce qu'elle a dû se tordre la cheville et puis elle a basculé dans le fleuve. J'ai vu ses yeux effarés, ses jambes, sa jupe qui lui retombait sur la tête, son slip, blanc, un bruit, un geyser. Il y a eu des remous. J'aurais pu plonger. J'ai crié, j'ai fait des gestes avec les bras. Alors des gens ont accouru. Ils ont vu. Ils regardaient ça plongeait, ça émergeait, ça replongeait, ça... Enfin quelqu'un a couru trouver un téléphone, dans un café ce qui ne manque pas dans un port. Elle coulait, remontait, dérivait. J'ai eu peur. Je n'ai pas plongé. Les pompiers ont mis du temps pour la retrouver, trouver le bon accès au fleuve, et la repêcher.

    Ils m'ont interrogé. La police. Le juge. Garde à vue. Ils m'ont épuisé. Suspicion d'homicide. Non, non ça c'est fait tout seul. J'aurai pu plonger. J'ai pleuré, je leur ai dit, j'ai paniqué, j'ai eu peur, plonger dans l'eau noire dans la nuit noire ...

     La vérité c'est que après que je lui ai eu dit Apolline pourquoi m'as-tu dit ça, je me suis avancé vers elle déterminé, impassible, sombre, elle a reculé, elle est tombée dans l'eau.

     ça s'est fait au ralenti...

    Je l'aime encore, c'est la seule femme que j'ai aimée. Tout au plus profond des boues du fleuve un crâne parfaitement poli par le temps doit se tenir bien sage, impeccable  ...

    Cramoiseau jubile, qui sait ? moi seul au monde ...

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dimanche 11 octobre 2015. 3 juillet 2023
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Le chat, le rat et la petite fille

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Le chat, le rat, et la petite fille

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  Le cui-cui de l'oiseau n'a pas duré longtemps dans la cour au pied de l'hortensia. 

     C'est un KKKru-ie... qui a réveillé mon ouïe assoupie et s'y est accroché. Oui, il y avait bien trois K.

    Surpris, intrigué, curieux, je me lève, j'approche de la porte-fenêtre. Je vois un chat qui paisiblement, méticuleusement, s'aidant de ses crocs, de ses pattes, dépèce un merle noir aux yeux tout ronds au bec éminemment pointu et jaune. L'oiseau déjà éventré n'est plus qu'un morceau de chairs sanguinolentes, de tripes à l'air dans lesquelles le chat trempe sa truffe frémissante, se délectant. Il écarte, il triture, fouille, éventre encore, savoure, déguste et se repaît. Mais soudain le chat se fige, pressent une présence, la mienne derrière la vitre, lâche la boule de chair rose et vers moi se retourne puis me fixe.

Je l'ai dans le viseur de mon appareil photographique que j'ai eu le temps d'aller prendre. Il fuit d'un bond. Mais je l'ai déjà pris tandis qu'il se substantait. 

Une heure s'écoule, le chat réapparait. Ce matin en sortant la poubelle du cabanon dans le fond du jardin, un rat avec une longue queue m'a filé entre les jambes. Le chat a peut-être aussi goûté du rat. Il connaît une peu la maison, parfois il la traverse et y séjourne, sans doute au retour de ses chasses quand il a trouvé mieux que des croquettes, qu'il a sa dose de petits oiseaux et qu'il éprouve le besoin de se reposer, de se reposer, le repos du chasseur. 

   Alors là, cet après-midi il vient au pied du canapé sur le tapis où joue la petite fille, s'allonger repu, heureux, sa queue se meut. La petite fille approche lui prend la queue, puis elle se met à plat ventre devant lui, les coudes sur le tapis, le visage dans ses petites mains, sa frimousse frottant son petit nez sur le museau du chat. Elle y avance ses petites lèvres pour un baiser mutin et le chat plisse ses yeux et sort sa petite langue rose et le chat digérant sans doute encore quelques tripes d'oiseau, de rats ou de mulots qui émeuvent ses papilles, lèche tranquillement le mufle de l'enfant. 

     Il est des langues de chat fraîches et perverses comme des langues d'enfants.

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Mardi 14 octobre 2014. 8 mars 2021

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Le martyre d'un tube dentifrice . ( 4 )

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Le Martyre d'un tube dentifrice
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     Quand Irène entra dans la salle d'eau, quand elle vit Jean-Gilbert dévisser le bouchon du tube dentifrice, quand elle le vit faire glisser son pouce sur la peau du tube de manière à faire monter la pâte vers l'ouverture et à le faire éjaculer sur les poils de la brosse elle eut une nausée, elle eut la vision d'une doigt qui caressait un sexe d'homme et le sentiment subit que son mari était homosexuel et s'exclama :

   -    Non Jean-Gilbert, pas ça, pas toi arrête ! c'est monstrueux ! 

     Il sursauta, surpris, tenant toujours le tube allongé sur le plan du lavabo qu'il pressait de son pouce implacable qu'il suspendit pourtant et se tourna vers l'épouse.

   - Quoi ! monstrueux ? mais en quoi, enfin qu'est-ce qui te prend ! que t'arrive t-il encore tu ne m'as jamais vu à poil dans la salle d'eau le matin à cette heure ? 

   Il regarda son sexe, un pendentif de chair blette dans une touffe de poils grisonnants, certes c'était laid, ça n'avait pas la classe d'un sexe en érection, mais quoi c'était ça un bonhomme pas toujours ragoûtant comme visuel ! c'était tous les matins comme ça depuis longtemps après l'érection matutinale, c'est mon sexe qui te répugne à ce point !

   - Mais vieux con, ce n'est pas toi que je regardais, encore moins ton haricot, ton truc, ton machin, ce fétu, ta calamiteuse pendeloque ...

    - Il ne tient qu'à toi chérie que ma pendeloque redevînt un brillant ardent et fier.


  Irène haussa les épaules, les hommes et leur maudit sexe !. Mais non c'est le tube, le tube de dentifrice t'as vu comme tu le pressais incongrûment comme tu lui appuyais sur le ventre 

   - !!!! ???

   - Oh ! ne roule pas des yeux comme ça, oui le tube, le tube dentifrice tu as vu comment tu le martyrisais et de manière indécente on eût dit que tu le branlais !

-   Quoi ! je branlais le tube dentifrice... ! branler ! quels mots vous prononcez Madame et quel dommage !

- Je t'en prie ne me regarde pas ainsi avec tes yeux de hareng-saur ! enfin oui un tube dentifrice ça se respecte, on l'accompagne, on le caresse, on ne le pressure pas comme tu l'as fait l'écrasant à lui crever le ventre ... 

    Jean-Gilbert regarda sa femme, elle devient folle, mais tu es folle ! ça y est tu glisses, tu sombres vers la démence sénile ... 

    Irène prend le tube. Je vais te montrer dit-elle 

   Elle prit délicatement le tube dentifrice entre son pouce et son index de la main droite puis de la main gauche dévissa doucement le bouchon et pressa le tube avec attention. 

   Elle suivit la montée de la pâte et en régula la sortie, un segment de coulis couleur menthe à l'eau montra le museau et cligna de ses petites molécules. Elle l'étendit sur le poil blanc, dru et dur de la brosse qu'elle rendit à un Jean Gilbert ahuri et reposa le tube ... 

   - Tu vois mon gros comment l'on doit traiter un tube dentifrice comme une amante, avec douceur, point n'est besoin de l'éventrer et de prendre le risque de gâcher la pâte, de lui donner des bleus ... Moi si je t'appuyais, si je pesais comme une malade sur ta graisse, tu gémirais comme une truie.

   Jean-Gilbert ne broncha pas, Irène devenait folle. Ces mots, ce langage de charretier n'étaient pas les siens...

    Elle poursuivait le regard comme perdu vers ces songes intérieurs que l'on n'achève jamais.

- Si je te tripotais vigoureusement et sans égard tu hurlerais, lui dit-elle. 

- Tout dépend je pourrais dire hum oui, encore, j'aime ah ! encore ! mais j'ai oublié le goût de tes doigts !

     Irène ne commenta pas et sortit. Jean-Gilbert prit le tube à son tour un peu cabossé par les malaxages qu'il venait d'éprouver et le pressa à nouveau. Il le lissa, qu'il était doux sous ses doigts et il s'appliqua cette fois à rééquilibrer la pâte à l'intérieur du tube qui retrouva la plénitude d'un corps joliment dense et aminci qu'il se surprit à caresser. 

     Ce tube entre ses doigts, qui se mouvait tendre, malléable, doux, l'apaisait, Jean-Gilbert éprouva même un instant durant au creux de son être, de son sexe même comme un suave frisson, une douce érection... oh ! même ...

     Il se retourna, Irène n'avait pas fermé la porte de la salle d'eau...

    Objet inanimé avez-vous donc une âme, Jean-Gilbert Cramoiseau venait de découvrir qu'un tube de dentifrice avait une sensualité. 

   C'était fou ... 

     Il lut sur le tube le mode d'emploi ...

    "  Pour un soulagement immédiat, appliquer jusqu'à deux fois par jour, directement avec le bout du doigt sur le ... sur la dent sensible, en massant doucement pendant une minute. Refermer après usage ... "

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Le Martyre d'un tube dentifrice

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     Quand Irène entra dans la salle d'eau, quand elle vit Jean-Gilbert dévisser le bouchon du tube dentifrice, quand elle le vit faire glisser son pouce sur la peau du tube de   manière à faire monter la pâte vers l'ouverture et à la faire éjaculer sur les poils de la brosse elle s'étonna.


   Elle eut la vision d'une doigt qui caressait un sexe d'homme et le sentiment subit que son mari était homosexuel et s'exclama :


   -    Non Jean-Gilbert, pas ça, pas toi arrête ! c'est monstrueux ! J'aime pas.


     Il sursauta, surpris, tenant toujours le tube allongé sur le plan du lavabo qu'il pressait de son pouce implacable qu'il suspendit pourtant et se tourna vers l'épouse.


   - Quoi ! monstrueux ? quoi t'aimes pas ! mais en quoi, enfin qu'est-ce qui te prend ! que t'arrive t-il encore tu ne m'as jamais vu à poil dans la salle d'eau le matin à cette heure ? 


   Il regarda son sexe, un pendentif de chair blette dans une touffe de poils grisonnants, certes c'était laid, ça n'avait pas la classe d'un sexe en érection, mais quoi c'était ça un bonhomme pas toujours ragoûtant comme visuel ! c'était tous les matins comme ça depuis longtemps après l'érection matutinale, c'est mon sexe qui te répugne à ce point !


   - Mais vieux con, ce n'est pas toi que je regardais, encore moins ton haricot, ton truc, ton machin, ce fétu, ta calamiteuse pendeloque ...

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    - Il ne tient qu'à toi chérie que ma pendeloque redevînt un brillant ardent et fier.



  Irène haussa les épaules, les hommes, leur maudit sexe ! et leur mâle rusticité. Mais non c'est le tube, le tube de dentifrice t'as vu comme tu le pressais incongrûment comme tu lui appuyais sur le ventre 


   - !!!! ??? Sur le ventre !


   - Oh ! ne roule pas des yeux comme ça, oui le tube, le tube dentifrice tu as vu comment tu le martyrisais et de manière indécente on eût dit que tu le branlais !


-   Quoi ! je branlais le tube dentifrice... ! branler ! quels mots vous prononcez Madame et quel dommage !


- Je t'en prie ne me regarde pas ainsi avec tes yeux de hareng-saur ! enfin oui un tube dentifrice ça se respecte, on l'accompagne, on le caresse, on ne le pressure pas comme tu l'as fait, l'écrasant à lui crever le ventre ... 


    Jean-Gilbert regarda sa femme, elle devient folle, mais tu es folle ! ça y est tu glisses, tu sombres vers la démence sénile ... 


    Irène prit le tube. Je vais te montrer dit-elle 


   Elle prit délicatement le tube dentifrice entre son pouce et son index de la main droite puis de la main gauche dévissa doucement le bouchon et pressa le tube avec attention. 


   Elle suivit la montée de la pâte et en régula la sortie, un segment de coulis couleur menthe à l'eau montra le museau et cligna de ses petites molécules. Elle l'étendit sur le poil blanc, dru et dur de la brosse qu'elle rendit à un Jean Gilbert ahuri et reposa le tube ... 


   - Tu vois mon gros comment l'on doit traiter un tube dentifrice comme une amante, avec douceur, point n'est besoin de l'éventrer et de prendre le risque de gâcher la pâte, de lui donner des bleus ... Moi si je t'appuyais, si je pesais comme une malade sur ta graisse, tu gémirais comme une truie.


   Jean-Gilbert ne broncha pas, Irène devenait folle. Ces mots, ce langage de charretier n'étaient pas les siens...


    Elle poursuivait le regard comme perdu vers ces songes intérieurs que l'on n'achève jamais.


- Si je te tripotais vigoureusement et sans égard tu hurlerais, lui dit-elle. 


- Tout dépend je pourrais dire hum oui, encore, j'aime ah ! encore ! mais j'ai oublié le goût de tes doigts sur mes intimes attributs  !


     Irène ne commenta pas et sortit. Jean-Gilbert prit le tube à son tour un peu cabossé par les malaxages qu'il venait d'éprouver et le pressa à nouveau. Il le lissa, qu'il était doux sous ses doigts et il s'appliqua cette fois à rééquilibrer la pâte à l'intérieur du tube qui retrouva la plénitude d'un corps joliment dense et aminci qu'il se surprit à caresser. 


     Ce tube entre ses doigts, qui se mouvait tendre, malléable, doux, l'apaisait, Jean-Gilbert éprouva même un instant durant au creux de son être, de son sexe même comme un suave frisson, une douce érection... oh ! même ...


     Il se retourna, Irène n'avait pas fermé la porte de la salle d'eau...


    Objet inanimé avez-vous donc une âme, Jean-Gilbert Cramoiseau venait de découvrir qu'un tube de dentifrice avait une sensualité. 


   C'était fou ... 


     Il lut sur le tube le mode d'emploi ...


    "  Pour un soulagement immédiat, appliquer jusqu'à deux fois par jour, directement avec le bout du doigt sur le ... sur la dent sensible, en massant doucement pendant une minute. Refermer après usage ... "


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Samedi 30 avril 2011. Mercredi 4 décembre 2013. 23 septembre 2019



Moi, brosse à dents, petit balai à chiotte

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    Naguère un président qui se disait normal se moqua des sans-dents. Il est vrai qu'un sans-dents étonne, répulse et répugne. Mais mais comme l'on peut perdre ses cheveux, l'on peut perdre ses dents, je n'y connais rien en cheveux je n'en parlerai pas, mais je m'y connais pas mal en dents et pour cause je suis une brosse, une brosse à dents ... 

   Je me présente, je suis en effet une brosse à dents, une brosse à dents toute bête, une brosse à dents lambda, tout en manche et poils drus. Et Moi et mes poils nous n'en pouvons plus et avons beaucoup à dire ...

  Car enfin

  Faut voir comme et comment vous nous empoignez à chaque fois matin midi et soir, enfin que le matin surtout car un peu crades et flemmards sur l'hygiène dentaire vous faites la plupart du temps l'impasse le midi et le soir, moins le soir parce que l'amour appelle des échanges d'haleines aux senteurs de monofluorophosphate de sodium, de fluorure de sodium, de benzate, de laurisulfate, d'hexamétaphosphate, de silice de neubourg, d'huile essentielle, de menthe poivrée rectifiée, de parahydroxybenzoate de méthyle que contient cette pâte que vous avez fait abondamment dégouliner sur les poils hébétés à coup de pressions insanes sur le tube écrasé. 

   Donc vous vous lancez dans de longs va-et-vient désordonnés, un peu hystériques de bas en haut de haut en bas, de long en large de large en haut qui font baver et valser mes poils sur les dents, les gencives, qu'ils griffent, pénètrent et font saigner gaiement ... .

 Et vos bouches pendant trois minutes se gargarisent, éructent et crachent  la pâte dentifrice.
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   Mais mes poils du coup sont mieux placés que moi pour évoquer leurs propres souffrances, aussi ont-ils leurs mots à dire, alors parlez poils ! la parole est vous. Car le moins que l'on puisse dire c'est que vous ne nous aidez pas vous les humains, nous les brosses et nos poils. 

   Globalement vous êtes sales. Vous ne savez pas vous tenir, vous entretenir.

    Oui Nous les poils, merci la Brosse et comme vous avez raison, Nous tout de pâte moussant, nous chatouillons, fouinons, fouaillons les dents, leur extirpons mille dépôts de détritus accumulés et puants de bactéries souvent pullulant, vous soutirant des bribes de charcuteries, de salades, énervant et faisant  jaillir le sang de vos gencives malades... 

      Ingrates et lourdes tâches, mais nous sommes des pros et savons assumer pour autant, mais après usage quel mépris ! quel irrespect ! En effet la plupart du temps vous ne nous nettoyez pas, vous nous recasez dans notre boîtier mouillé, rance, ou parfois patauge quelque vermine ..

  Eh oui, c'est ainsi oui Pouah ! Vous les dents, les dents jaunes, les dents grises, les dents noires, les dents creuses et nauséeuses, où fermentent les détritus de bouffes mal mâchées, les dents cassées, les chicots aux plombs cachés et oubliés... Honte à la maltraitance que vous nous infligez... ! alors vivent les sans-dents ! mais c'est bien dommage.    

   Faut le dire, le clamer, Nous les brosses à dents nous sommes les balais à chiottes des dents qui n'en sont pas responsables et n'en peuvent mais, car les bouches sont des chiottes et souvent un balai-chiotte a droit à plus de considération qu'une brosse à dents, par exemple lui, on lui fait prendre un bain d'eau de javel alors que vous nous laissez stagner dans l'eau trouble qui s'égoutte de nos poils dans la boîte . S'il vous plaît vous faites nous des bains d'Eludril.

   Non ! notre vie n'est pas une vie . L'on nous fait patauger dans les auges, dans les bas-fonds des crasses sordides de l'humaine nature, celles de ces bonshommes et de ces bonnes femmes toujours propres sur eux du moins dans leurs extérieurs et sentant plus ou moins bons mais très crades dans les plis et replis de leurs intérieurs obscurs.

   Oui car croyez-moi il ne faut pas aller trop voir, trop soulever, trop humer, trop approfondir parce qu'alors, alors, on en dirait des choses oh oh ! ah ah ! l'on en dirait des choses...Si vous saviez mais le devoir de réserve nous oblige.

   Avec mes amis le Tube dentifrice, sa pâte et mes poils nous avons décidé de créer le collectif des agents de la répurgation buccale. 

   Enfin je crois même qu'un collectif des dents veut se joindre à notre cause ... d'ailleurs, allez parlez aussi, parlons, tous ensemble, tous ensemble ...
   
   Oui, chère Brosse et merci, nous les dents souhaitons revendiquer le respect de cet émail si fragile qui fait l'éclat des bouches et des dentures mais que l'on malmène par le déversement du chaud et du froid et le croquage de sucreries multiples, par la succion de sucres d'orge, de caramels mous, ces dents qui induisent le charme, la séduction, la beauté qui font le sourire et le visage radieux.

   Et c'est Nous les Dents qui adjuvants de l'amour, triturons et titillons les mamelons, les tétons, les boutons, et mordillons toutes les lèvres de l'amour, les petites, les grandes, et puis un jour l'on nous creuse, l'on nous dévitalise, l'on nous arrache,- Ô l'arrachage, l'extraction sauvage, barbare de l'une de nos congénères oh ! la douleur, comme un petit martyre, je vous en reparlerai - l'on nous jette et remplace ...

    Ah ! Vous les humains vous êtes des mal élevés, des pas lavés, des malpropres, des crados, l'on vous donne des dents pour être beaux et belles, pour sourire, pour séduire, pour aimer, et vous gâchez tout, vous galvaudez tout, enfin pour m'apaiser un peu je vais vous conter cette anecdote, c'est Georges Moustaki qui raconte, qui raconte qu'une de ses maîtresses avant de lui faire l'amour exigeait de lui inspecter les dents afin de vérifier qu'elles n'avaient pas de caries.
   
   
   Alors hein ! brosse à dents et tube dentifrice, pâte et poils, dents même combat ...

    Vous avez raison dents de mon coeur, mais enfin un dernier mot quant à moi la Brosse car j'oubliais faudra parler aussi de notre recyclage la retraite venue, j'en ai marre de faire reluire les argenteries, de dégraisser les chaînes de vélo, c'est épouvantable, les chaînes de vélo ... ! Vous nous réduisez en l'état de lopes, c'est ça le nouveau monde hein ! ? c'est ça ?


    N'avons-nous tant brossé que pour ces infamies !



20 janvier 2020
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* Elle n'a que vingt-ans . ( 1)

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Elle n'a que vingt ans

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Elle n'a que vingt ans, et elle vend du fromage sur la place du marché. Du fromage de chèvre. C'est son plaisir à elle de vendre du fromage. De chèvre. Eux, qui arpentent l'allée, ils n'ont plus vingt ans. Ils ont quatre fois vingt ans. Mais ils n'en sont pas fautifs. Alors comme tous les jeudis matin ils font leur marché comme tous les vieux, le dos voûté, le pas traînant, le regard biaisé, le cabas au bout du bras .

Elle qui n'a que vingt ans, elle s'avance et les hèle, présentant sur le bord de sa spatule un soupçon de fromage de chèvre.

-   Allez ! les amoureux ! voulez-vous un crottin, un p'tit bout de fromage pour vous parfumer la bouche...

Mais les vieux dès qu'on leur parle, ils pressent le pas, ils n'aiment pas qu'on les remarque, qu'on les épingle, surtout pas qu'on les interpelle. Le vieux, là, ralentit le pas, se retourne. Les vieux aiment bien regarder les jeunes filles en fleurs à défaut de les lire. Elle le regarde celle qui n'a que vingt ans, un percing à l'oreille, un anneau dans le nez, un tatouage sur l'épaule, elle lui sourit, elle lui fait quelque chose avec ses lèvres lui tendant sa spatule et son bout de fromage, elle lui fait un clin.

Mais le vieux presse le pas pour rattraper la vieille qui siffle entre les dents de son dentier, c'est un vieux dentier, l'air passe à travers les dents et qui lui dit ; " Mais vas-tu venir Lucien ! Ne vois-tu pas qu'elle te fait son cinéma, qu'elle nous moque cette voyouse, elle vieillira aussi la petite garce. Elle apprendra quand elle aura notre âge que l'on ne se parfume pas la bouche, on se la désinfecte et on se colle le dentier sur les gencives. Elle n'a pas honte ! Nous stigmatiser ainsi, nous insulter en nous criant : 

" Allez les amoureux " !

      - Bah ! Henriette on l'a été amoureux 

      - Ah tu crois ! 

     - Et puis elle n'a pas crié !   

La vieille répond : " Forcément t'es sourd "   Et la vieille parle toute seule ... Allez les amoureux comme si comme si on s'aimait à notre âge ! la petite salope !

Le vieux qui n'est pas sourd du tout  ne dit plus rien le nez sur ses godasses et s'engonce davantage dans sa canadienne du siècle dernier qui appartenait à son oncle comptable aux chantiers navals.

L'amour, les amoureux ! c'est vrai. Celle qui n'a que vingt ans leur fait mal, çà lui fait mal. Lui il sait. Lui, il sait sa vieille, blanche, grosse et blette, toute gonflée et retombée de partout qu'il voit tous les matins nue s'agrippant, crispée, de ses mains tordues par les rhumatismes sur les bords de la baignoire qu'elle met dix minutes à enjamber quand elle y entre, dix minutes quand elle en sort, horrible quand elle s'y accroupit ou s'y allonge. 

      Mais lui, pas mal non plus, blanc, replet, tout en retombées aussi, l'engin comme un morceau de mou pour le chat, comme une breloque. Alors soudain le vieil homme est envahi par une onde de souvenirs bleutés, de seins ronds, tièdes et mous comme écrivait Jules Laforgue et de croupes tendres et ondulantes. Et celle-là qui jadis lui avait un soir sous la lune et sous les pins, minaudé : " Moi, je me laisse embrasser, mais je reste froide." Quel con ! le nase ! Il ne l'avait pas embrassée. Elle n'avait que vingt ans elle aussi. Il en avait autant. Une brûlure profonde le parcourt, ces ferveurs approchées, ces désirs avortés, ces amours déçus, ces cendres froides qu'une mémoire ravivée soudain attise et ravive de nouveau des décennies après, des décennies après.

Elle n'a que vingt ans, elle ne peut pas savoir. Lui, il sait maintenant. Elle saura à son tour. Allez les amoureux, un petit bout de crottin pour vous parfumer la bouche. Elle ne saura jamais l'incongruité qu'elle a commise. Le regard du vieux s'égare sur les jambes décharnées de sa vieille. Elle a raison sa vieille, elle vieillira aussi la petite garce, alors elle saura. Le vieux ricane. Encore faudrait-il qu'elle atteigne notre âge. Il se retourne encore. Il l'aperçoit pas loin. Elle le voit, le vieux la plombe du regard. Elle ne pouvait pas les laisser passer tranquillement celle-là, ils ne lui demandaient rien, on est bien nous dans nos petites misères, en notre crépuscule, voilà déjà longtemps qu'on essaie de les apprivoiser nos décrépitudes... faut pas les souligner, c'est pas bien, ça fait mal, qu'avait-elle besoin de remuer leur intimité...

  Elle n'a que vingt ans. Elle vend du fromage. De chèvre. Elle persiste et lui fait un petit signe de la main, mais pas moqueur, gentil, un sourire comme une tendresse. Il la fixe encore. Elle a peut-être compris. Un peu. Elle regrette, peut-être pressent-elle qu'elle a fauté ... Mais lui se hait maintenant, souffre. Le ; " Allez les amoureux " sonne comme le cri d'une révulsion de soi, comme le rappel d'une vie que l'on a ratée. Elle a raison sa vieille, elle vieillira comme eux la fille qui n'a que vingt ans, mais elle peut mourir avant, elle. Hein ! elle peut mourir avant ! Alors le vieux se raccroche au bras de sa vieille, sourit et leurs pas repartent à l'unisson. Elle peut mourir avant eux celle de vingt ans...

    Tous deux à l'unisson encore ont la même pensée qui les réjouit, les réchauffe, oui elle mourra peut-être avant d'atteindre leur âge. Et leur pas s'allège, et leurs lèvres affectent un sourire, ils sont heureux presque, soulagés, elle va peut-être et pourquoi pas hein ! mourir avant eux ..

    Mais la première page du petit carnet à petits carreaux de la jeune rosière, la petite marchande de fromage, porte en exergue ; " J'ai vingt ans et je ne veux pas mourir." "

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7 mars 2021/lundi 14 août 2023/ Lundi 9 septembre 2024 . jpm

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dimanche 13 août 2023

Nouvelle - 37 - Carla fait pipi

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Carla Bruni

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Dans l'émission " Thé ou Café " ce Dimanche matin 26 mai 2013 sur France 2 Catherine Ceylac la dame qui aime bien développer ses jambes-nues reçoit Carla Bruni-Sarkozy et lui demande :

- Portez-vous des dessous dépareillés ?

Je n'ai pas entendu la réponse dont à vrai dire je n'ai rien à faire puis la dame aux jambes nues qui jadis jouait le rôle de la poupée Barbie auprès de l'animateur Jacques Martin sur les plateaux de Dimanche Martin, poursuit : " Si vous étiez un homme le temps d'une journée que feriez-vous ? "

Et Carla de répondre  :

- Je ferai l'amour, je ferai pipi, c'est pas mal non ?

     ça c'est une femme ! c'est du sérieux comme le disait d'elle son président de mari.


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